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objectifs Pro indépendance politique

La promotion de l’indépendance

Organiser l’accès à l’indépendance

Extrait du chapitre 4 du livre sur "L'indépendance comment y arriver ?" par Ronald Sirard

Le chapitre part d’un constat simple : après avoir clarifié l’argumentaire en faveur de l’indépendance, il faut définir comment y parvenir concrètement. Pour l’auteur, l’objectif opérationnel unique n’est ni de préparer un référendum ni de faire élire un parti « indépendantiste », mais de convaincre une majorité de Québécois de la nécessité de l’indépendance. C’est la seule voie démocratique viable : créer un consensus d’appui suffisamment fort pour qu’un gouvernement dûment élu proclame l’indépendance dans le cadre parlementaire.

1- Revoir le rôle des partis politiques

L’auteur remet en question le réflexe historique de confier aux partis (PQ, Bloc et autres) à la fois la promotion et la réalisation de l’indépendance. Selon lui, ces organisations sont, par nature, des machines électorales structurées pour gagner des sièges, non pour mener une campagne sociopolitique permanente visant à faire croître l’adhésion populaire à un projet de refondation étatique. Résultat : deux objectifs distincts (« gagner des élections » et « faire avancer l’indépendance ») se concurrencent dans la même structure, sans séparation claire des moyens, des budgets et des responsabilités.

 

Il appuie sa critique sur une expérience interne au Bloc Québécois : le comité « Québec capitale d’un pays » (2016). Bien qu’avalisé officiellement et doté d’une page de financement, son modèle de collecte rendait ses activités subordonnées aux objectifs de financement électoral des circonscriptions (autorisation locale préalable, transfert de fonds conditionnel, quote-part gardée par les associations, portée limitée à la région de Québec). Concrètement, aucune ressource significative (budgétaire ou humaine) n’était dédiée à la promotion nationale de l’indépendance ; l’appareil, de haut en bas, demeurait calibré pour l’électoralisme. L’épisode éclaire, selon l’auteur, la « schizophrénie » structurelle du Bloc : on exige des élus qu’ils portent l’objectif idéologique, alors que l’organisation – ses budgets, sa comptabilité, sa chaîne d’arbitrage – reste orientée vers la conquête de sièges. Faute de deux sous-unités distinctes (élections vs. promotion de l’indépendance) avec mandats, ressources et mécanismes de coordination dédiés, les conflits sont inévitables et l’efficacité, faible.

2- La nécessité d’un plan d’action précis

Postulat central : on n’atteint un objectif que s’il est opérationnalisé. Avant les constitutions, élections « thématiques » ou grands discours, il faut un plan d’action qui détaille : cibles, canaux, contenus, séquences, mesure des résultats. Le cœur du plan : faire croître l’appui populaire. L’auteur préconise des objectifs mesurables (p. ex. +5 % d’appui par année), des sondages réguliers (au moins semestriels) et l’évaluation des dirigeants, des programmes et des activités sur leurs résultats. Sans cette discipline, on dilapide des ressources pendant des années.

3- Créer une organisation vouée exclusivement à l’indépendance

Constatant que les partis existants ne peuvent servir simultanément deux fins, l’auteur propose de fonder une organisation nationale dédiée à un seul but : faire l’indépendance, avec un modèle juridique… paradoxal : un parti politique fédéral. Pourquoi fédéral ? Non pour concurrencer le Bloc sur le terrain électoral, mais pour accéder aux crédits d’impôt fédéraux très généreux accordés aux donateurs (75 % sur les premiers 400 $, 50 % sur les 350 $ suivants, 33 ⅓ % au-delà, plafond 1 725 $). Ainsi, chaque don de 400 $ ne coûte que 100 $ au donateur, le reste étant « financé » par Ottawa via le crédit d’impôt. L’auteur y voit un levier financier massif – « faire financer la promotion de l’indépendance par la partie adverse » – aujourd’hui sous-exploité.

 

Un parti « minimalement électoraliste »

 

Pour conserver son statut reconnu, le parti devrait présenter au moins un candidat aux élections générales, hors Québec si on veut éviter toute concurrence avec le Bloc (p. ex. Saint-Jean de Terre-Neuve, Calgary, Vancouver). Ces candidatures serviraient surtout à porter le débat sur l’après-Québec du côté canadien. L’expérience montre, argue l’auteur, que la concurrence élargit souvent le marché : un nouvel outil de financement ciblé n’assécherait pas nécessairement les dons au Bloc ou au PQ, mais augmenterait l’enveloppe globale consacrée à la cause.

 

Une plateforme de sociofinancement orienté

 

Innovation clé : les dons sont fléchés vers des projets précis proposés par l’organisation (ou par la société civile) : campagnes de communication, études, sondages, « salon de l’indépendance », comité « Québec capitale d’un pays », groupe sur la péréquation, etc. Les projets sont présentés en détail, puis récoltent des engagements ; seuls ceux qui atteignent leurs cibles sont exécutés. Ce mécanisme agit comme un sondage permanent sur la pertinence des idées : si personne ne finance, c’est qu’il faut revoir le projet. 20 % des dons finance la gestion (plateforme, coordination, plan d’action), 80 % vont aux activités choisies. En dehors des périodes électorales, un parti fédéral peut dépenser librement : il peut donc financer des coalitions (p. ex. Oui Québec), des études, des campagnes, etc.

 

Une gouvernance légère, participative et contrôlée

 

Conseil exécutif de cinq personnes élues (président, secrétaire, directeur du plan d’action, directeur de la coordination au Québec, directeur de la démocratie interne) – mandats de trois ans.

 

Conseils régionaux (une dizaine), également de cinq membres, habilités à proposer des projets régionaux sur la plateforme et à gérer les fonds dédiés, sans dupliquer l’administration centrale.

 

Démocratie numérique : votes universels des membres pour trancher les grandes orientations ; consultations facilitées par Internet/téléphone.

 

Adhésion : membre = don annuel minimal de 20 $ + coordonnées permettant de voter ; perte du statut après trois scrutins manqués.

 

Contrôle démocratique : mécanisme de plainte des membres contre des élus du parti, avec comité ad hoc tiré au sort disposant de pouvoirs de sanction (jusqu’à l’exclusion), et possibilité de référer certaines décisions au vote des membres.

 

Clauses protégées (modifiables seulement aux ⅔ des votants) : vote universel pour les orientations, plateforme de sociofinancement fléché, absence de candidats au Québec, recours interne effectif contre les dérives.

4- Redéfinir le rôle du Parti Québécois

Le PQ ne doit plus porter seul le message de l’indépendance ni servir de proxy pour mesurer l’appui à la souveraineté. Les intentions de vote varient pour mille raisons étrangères à la question nationale. La nouvelle organisation offrirait au contraire un outil de financement et d’action que le PQ n’a pas : au provincial, les dons sont plafonnés à 100 $ et sans crédit d’impôt. Le parti fédéral dédié permettrait à des donateurs d’investir davantage (avec crédit d’impôt), sans priver le PQ de ses apports — au contraire, la professionnalisation de la promotion pourrait tirer vers le haut l’ensemble des contributions et compléter le financement public indexé sur les résultats électoraux (logique propre aux partis québécois, absente des motivations de la nouvelle organisation).

L’auteur plaide pour un dispositif clair et cohérent : un discours simple, une démarche juridique et politique sans ambiguïté, et surtout une organisation conçue uniquement pour faire monter l’appui à l’indépendance, mesurer cette progression, réallouer les moyens aux actions qui fonctionnent et rendre des comptes. Avec un plan d’action structuré, des objectifs chiffrés, une gouvernance légère mais exigeante, et un levier fiscal maximisant chaque dollar militant, le mouvement sort de la logique des « bons réflexes électoraux » pour entrer dans celle de la conquête méthodique de la majorité.

 

En filigrane, un renversement : plutôt que d’attendre des partis électoraux qu’ils « fassent les deux », la société indépendantiste se dote d’un instrument spécialisé qui agrège, finance et orchestre les meilleures idées – selon l’arbitrage direct des citoyens-donateurs. C’est, selon l’auteur, la condition pour passer d’un demi-siècle d’efforts dispersés à une campagne professionnelle, continue et mesurable dont l’unique horizon est l’aboutissement : l’indépendance du Québec.

Le livre sur "L'indépendance comment y arriver ?" par Ronald Sirard

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